Sarah, connue sous le nom de Syqlone, crée un genre musical unique en fusionnant la bass music et les sonorités arabes. Son dernier double single, « Amon The CEO », composé des titres « Mutation » et « Squallcorp », est sorti chez Gros:Œuvre Records. Ce projet lui permet de renouer avec ses racines marocaines et d’affirmer son message « Fuck you les fachos ».
Syqlone décrit sa musique comme du « cyber-chaâbi », un sous-genre de musique électronique qu’elle a créé. Pour elle, c’est une manière de s’exprimer librement et de célébrer sa culture maternelle. Issue d’une famille où la musique est omniprésente, elle a été inspirée par les fêtes et les célébrations au Maroc, où la musique est un élément essentiel de la vie quotidienne.
L’artiste aborde également des sujets politiques, notamment en parlant de l’identité amazighe et arabe des Maghrébins. Pour elle, c’est un engagement militant de revendiquer son identité arabe dans un contexte où elle se sent attaquée. Malgré les attentes du public, qui s’attend à ce qu’elle fasse de la musique arabe sur scène, Syqlone reste fidèle à sa musique bass.
Syqlone a commencé à jouer sous ce nom il y a deux ans et demi, se sentant isolée musicalement. Avant cela, elle faisait partie d’un groupe d’électro-punk appelé OK Plague. Son projet solo lui a permis d’explorer de nouveaux horizons musicaux tout en restant fidèle à ses racines et à son message de liberté et d’engagement politique. Je m’habillais en roi, on mettait des têtes de Zemmour sur des gens, et on se tapait… Sur la scène des musiques actuelles françaises, ça n’existe pas. Nous étions des outsiders ! Machine Girl, The Garden, ce sont des groupes qui font salle comble quand ils viennent en France, donc il y a une demande du public pour cette esthétique. Mais nous ne savions pas où nous situer, ni dans quel genre nous nous classer : métal, punk, électro… Les gens étaient choqués. Par exemple, j’étais souvent dans la fosse, ce qui est très anglo-saxon dans la relation avec le public. En France, on reste sur scène et on propose quelque chose, on doit convaincre le public. Pour nous, c’était un moment de partage, la musique passait au second plan.
J’ai commencé par le violon pendant 12 ans, mais j’étais très mauvaise ! Mon professeur était exaspéré par mes quarts de ton et mes syncopes. J’ai réalisé que la musique occidentale est très rationnelle et ne laisse pas de place à la liberté. J’ai été attirée par des musiques plus libres au niveau du tempo et des mesures. J’ai fini par jouer du klezmer et du jazz, mais je n’aimais pas cet instrument. Récemment, j’ai commencé à jouer du chaâbi au violon, que j’utilise beaucoup dans mes productions. J’enregistre jusqu’à 55 pistes de violon pour créer un ensemble de cordes. Cela me donne l’impression d’être à la Philharmonie de Paris ou d’être Hans Zimmer.
Le fait d’écouter des musiques symphoniques au conservatoire m’a beaucoup influencée. Cela m’a formée, même si je n’utilise pas le solfège dans mes compositions. Mes morceaux à venir comportent beaucoup d’arrangements orchestraux, ce qui est assez rare.
Je puise mon inspiration dans les rythmes actuels que je trouve sur TikTok et Instagram. Ma musique est très contemporaine, ancrée dans la culture actuelle de la diaspora en France. Je ne prétends pas représenter la culture marocaine au Maroc, mais je peux être une voix pour les enfants d’immigrés qui ont grandi ici toute leur vie. L’identité maghrébine est complexe à définir socialement et politiquement. En tant qu’artiste, je témoigne des difficultés que nous rencontrons.
Je fais de la musique bizarre parce que je suis bizarre. En tant que musicienne maghrébine, on m’attend souvent à jouer de la musique marocaine, mais je fais de la bass ! Les gens sont surpris quand je monte sur scène, car je ne correspond pas aux clichés. Mon single « Mutation » est un manifeste pour les « êtres mutants » qui ne rentrent pas dans les cases. Ce sont ces anomalies qui feront évoluer le système. Les paroles de la chanson reflètent cette idée d’invisibilité jusqu’à ce qu’on se fasse entendre. Les événements récents ont montré que c’est dans les moments de revendication que les gens sont enfin visibles. Les invisibles de la scène musicale : une interview avec Syqlone
Syqlone, artiste émergent, est présent dans de multiples espaces de la vie quotidienne : Uber, caisse, ménage des toilettes… Pourtant, leur travail et leur présence passent souvent inaperçus, se perdant dans le silence.
Syqlone et les Psychotic Monks : une amitié musicale
Lors d’un concert parisien dédié à la cause palestinienne, Syqlone a partagé la scène avec les Psychotic Monks. Ces derniers, connus pour leur identité punk et leur ouverture musicale, s’intéressent de près à la musique de Syqlone. Alors que les Monks s’orientent vers l’électro, Syqlone voit dans ce mouvement une liberté d’expression et une accessibilité qui attirent les marginaux sociaux. Malgré leur amitié, Syqlone avoue ne pas être très porté sur le rock noise.
La musique comme forme de résistance
Dans un contexte de lutte et de tension sociale, Syqlone ressent le poids de la situation. Jouer de la musique devient un défi, surtout lorsqu’il voit les gens danser. Cependant, Syqlone encourage le public à se défouler, à prendre une pause pour mieux reprendre la lutte. À la fin de leurs concerts, Syqlone incite les spectateurs à soutenir des causes, à se mobiliser et à agir. Pour Syqlone, la salle de concert est un espace de soin et de recharge, avant de retourner dans la rue pour l’action.
Conclusion
Syqlone, à travers son art et son engagement, montre que la musique peut être un outil de résistance et de solidarité. Leur message résonne dans un monde en proie à des luttes et des injustices, invitant chacun à s’impliquer et à agir pour un changement positif.